Mercredi 12 mars 2025

Assemblée nationale : Le Parlement s'attaque à la disparition des terres agricoles

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terre agricole
Dans la nuit du mardi 11 au mercredi 12 mars 2025, l'Assemblée nationale a adopté en première lecture une proposition de loi visant à lutter contre la "disparition des terres agricoles" due à la "consommation masquée".

Ce phénomène se produit lorsque des non-agriculteurs acquièrent des terres agricoles pour en modifier l'usage, notamment en terrains d'agrément. Porté par Peio Dufau, député apparenté socialiste des Pyrénées-Atlantiques, le texte a été largement soutenu et doit désormais être examiné par le Sénat.

La crise sanitaire, le développement du télétravail et l'engouement pour les résidences secondaires ont accentué ce phénomène. En 2023, une superficie équivalente à 2,5 fois celle de Paris a été détournée de son usage agricole. Les Sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer), chargées de réguler le foncier agricole, disposent d'un droit de préemption. Cependant, ce droit est souvent contourné, notamment lorsque des habitations sont présentes sur les terres mises en vente. Dans les zones prisées, le coût du bâti peut largement dépasser celui des terres agricoles. La Safer peut proposer une préemption partielle, mais le propriétaire peut refuser de scinder ses biens, rendant le droit de préemption inopérant dans plus de 8 cas sur 10.

Un exemple marquant est celui d'Arbonne, près de la côte basque, où un lot comprenant des terres agricoles et une habitation a été mis en vente à 3,2 millions d'euros. Le propriétaire refusant de séparer les terres du bâti, la Safer n'a pas pu exercer son droit de préemption. Ce cas a conduit à une occupation de la propriété pendant 100 jours pour protester contre cette vente.

 

La proposition de loi vise à renforcer le droit de préemption des Safer en leur permettant d'obtenir un acte de cession séparant les terrains à usage agricole des bâtiments d’habitation. Elle prévoit également d'étendre ce droit à de nouvelles communes et d'instaurer un droit de visite. Ces mesures visent à protéger la surface agricole utile, considérée comme un "trésor" par la ministre de l'Agriculture, Annie Genevard.

Cependant, la ministre a émis des réserves concernant la constitutionnalité de certaines dispositions, notamment en ce qui concerne le droit de propriété. Elle a suggéré que des modifications soient apportées lors de la navette parlementaire pour assurer la conformité du texte aux droits et libertés constitutionnellement garantis.

Cette initiative législative intervient alors que les deux tiers des agriculteurs français devraient partir à la retraite dans les dix prochaines années, augmentant le risque de changements d'usage des terres agricoles. La proposition de loi vise donc à préserver la vocation agricole de ces terres face aux pressions foncières et spéculatives.