Corse Malte (Ordre de Malte de France), la plus vieille organisation caritative du monde

Cet ancien rugbyman, ce colosse à la voix rocailleuse, peut vous impressionner, de prime abord. Mais son apparence est trompeuse, et sa discrétion laisse néanmoins transparaitre sa bienveillance et sa générosité. La magagne et les histoires drôles ne sont jamais loin, surtout autour d’un bon repas. Barthélémy est l’ancien directeur général d’un grand groupe bancaire et d’assurances. Il sait manier le verbe, agir et prendre des décisions. Il a l’habitude d’accompagner les hommes et les femmes dans leur travail, c’était un manager. Originaire de Savaghju, à Vivariu, il s’installe à Bastia à son retour en Corse. Passionné de ballon ovale, il est toujours membre du club Bastia XV. Lorsque l’on évoque ses motivations, Barthélémy prononce immanquablement le mot « chrétien ». Il l’est profondément, dans le premier sens du terme, celui du don, de la générosité et de la charité envers les plus démunis, d’où qu’ils viennent, et quelles que soient leurs religions. Outre sa confrérie bastiaise, il intègre l’association Fratellanza de Bastia. Celle-ci s’occupe d’adultes en difficulté d'insertion sociale et propose un hébergement social.

Sollicité par des membres de Corse Malte, créé en 1986 par Huguette Orsatelli, il y adhère en 2015. Il en accepte la présidence en 2016. Il y apporte toute son énergie et ses compétences organisationnelles et managériales. Le dispensaire de l’hôpital de Toga, ouvert en 2010, est réorganisé. Des dons permettent d’améliorer considérablement son équipement médical. Il applique en permanence sa maxime préférée : « Jack of all trades, master of none » (valet de toutes activités, maitre d’aucune). En clair, on se concentre sur ses objectifs, on ne peut pas tout faire.

Le leitmotiv de Barthélémy est « la transparence ».

Toute l’activité est bénévole, les seuls achats concernent le fonctionnement du dispensaire, les achats de médicaments. 12 médecins généralistes, dentistes, psychologues, cardiologue et 6 pharmaciens, actifs ou retraités se relaient. Une avocate offre même ses services, sur demande, essentiellement pour des dossiers de reconduite à la frontière.

La professionnalisation du dispensaire se traduit par un calendrier précis, même si l’épidémie du covid le perturbe encore. Il dispose d’une salle d’attente, d’un cabinet médical généraliste, d’un cabinet dentaire, d’un cardiologue, d’un psychologue. Ils sont 12 médecins à se relayer, actifs ou retraités. 6 pharmaciens, tous les jours de la semaine, délivrent à tour de rôle des médicaments, sur ordonnances, prescrites aussi bien par les praticiens du centre, que par l’hôpital ou les médecins de ville. 2 000 délivrances de médicaments, plus de mille consultations par an. 70% des patients sont d’origine maghrébine, 20% des pays de l’est, 10% de France et de Corse.

A ces activités s’ajoute, le dimanche matin, quand tout est fermé, le petit déjeuner offert, à tous, dans la salle de réunion (500 par an).

Mais cette description, si elle semble aride, ne doit pas faire oublier le sens profondément humaniste de ce dispensaire. Un des médecins du centre raconte qu’il a, enfin, l’impression de respecter son serment d’Hippocrate. Tout s’articule autour d’un objectif quasi millénaire, chrétien, celui des «hospitaliers de saint Jean de Jérusalem» : Soigner les plus démunis. En effet, en France, en Corse, il y a des êtres humains qui n’ont pas accès aux soins. Pour eux, pas de carte Sesame Vitale, pas de CMU. Sans papiers, sans domiciles fixes, travailleurs clandestins, réfugiés, tous ces fameux « invisibles » peuvent ici se faire soigner, dignement, gratuitement, quelles que soient leur origine ou leur religion.

Barthélémy, s’il reste président de Corse Malte, a laissé sa place de délégué de l’Ordre de Malte de France à son amie, Marie Claude Filippi. Ils se sont rencontrés sur les terrains de rugby. Marie Claude est médecin, spécialisée en médecine sportive. Elle a été le docteur du Sporting Club de Bastia. Suite à des problèmes de santé, elle a arrêté son activité professionnelle. Désormais, elle coordonne avec sérieux et professionnalisme les actions du dispensaire.

Mais Barthélémy, Marie Claude et tous les bénévoles de Corse Malte sont inquiets. L’ancien hôpital de Toga va faire l’objet d’une opération immobilière, et il faudra quitter les lieux en 2023. D’ici là, il faut trouver un local pour perpétuer leur action caritative et médicale. Corse Malte recherche, à louer ou à acheter, un local, de préférence en ville, accessible à tous, avec quelques places de parking pour les bénévoles. La superficie doit être comprise entre 120 et 150 m² pour héberger les diverses activités de l’association. La municipalité de Bastia est informée. Il s’agit d’un challenge, essentiel, que tous vont relever avec la fierté de leur engagement aux services des pauvres. Ils perpétuent ainsi, discrètement, mais efficacement, la tradition initiée par Gérard d’Amalfi, en terre de Jérusalem, il y a si longtemps.

Résumé de l’histoire de l’Ordre :

En 1048, année 439 de l’Hégire. Asad, ancienne esclave nubienne, est la régente du califat Fatimide d’Égypte, qui possède Jérusalem. Elle autorise des marchands de la république maritime d’Amalfi à construire une église, un couvent et un hospice dans la ville sainte. Ce dernier est destiné à soigner les pèlerins de toutes origines et toutes religions.

Vers 1070, L’Amalfitain frère Gérard créé un autre hôpital dédié à Saint Jean et dirige l’établissement jusqu’à sa mort en 1120. Par une bulle papale de 1113, l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem devint indépendant, sous la conduite de son fondateur, le bienheureux Gérard.

Expulsés de Terre Sainte après la défaite des croisés en 1291, ils se réfugient d’abord à Chypre, puis à Rhodes, et enfin à Malte qu’ils vont diriger jusqu’en 1798.

C’est Napoléon qui les chassera de l’île. Leur siège est actuellement basé à Rome.   

Pie Postulatio Voluntatis, (Une pétition volontaire faite avec dévotion ...) est une bulle pontificale fulminée le 15 février 1113 par le pape Paschalis II, dans laquelle le pape reconnait officiellement la création des Hospitaliers de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem. Aujourd'hui, le document est conservé à la Bibliothèque nationale de Malte à La Valette, Malte.