Crash du Tracker en 1990 à Calenzana : Le pilote avait fait part de ses craintes

Intense émotion ce matin lors de la cérémonie du 31ème anniversaire de la disparition du pilote Philippe Gallet, 46 ans, père de quatre enfants, mort le 24 septembre 1990, lieu-dit « Luzzipeu », commune de Calenzana alors qu'il luttait contre un incendie.
Ce jour là ; il est 15h03 lorsque les « Tracker N°3 et N° 15 sont en mission de reconnaissance au-dessus de la Balagne après y avoir déjà effectué plusieurs largages. Philippe Gallet aux commandes du « Tracker 3 » décide d'intervenir afin de stopper la progression du feu et avant qu'il ne franchisse la crête lieu-dit « Bocca Serria ». L'avion, proche du relief, est victime d'un violent phénomène de vent rabattant qui met l'appareil sur le dos et le projette au sol, ne laissant aucune chance de survie à l'infortuné pilote.
Ce matin à 10 heures, la grande famille des pompiers, forestiers sapeurs et Sécurité Civile était là, devant la stèle érigée au bord de la RD 81 bis pour rendre hommage à Philippe Gallet, 46 ans, père de quatre enfants : Isabelle, Myriam, Philippe et Erwan.
Pour la première fois, 31 ans après la tragédie, les deux filles Myriam et Isabelle étaient présentes aux côtés de Pierre Guidoni, maire de Calenzana, Jean-Marie Seité, maire de Galeria, de deux anciens pompiers : Joël Brandaloni et « Loulou » Bicchieray, en service le jour du drame, le capitaine Régis Marchandeau, adjoint au commandant de compagnie de gendarmerie Calvi-Balagne, le commandant Frédéric Antoine-Santoni, de l'UDPSIS ...
Aux ordres du capitaine Stéphane Orticoni, chef de Centre de Calvi, les pompiers étaient rassemblés, avant que le Colonel Jean-Noël Rigot ne donne lecture des circonstances de cet accident qui a coûté la vie à Philippe Gallet.
Vous comprendrez que, psychologiquement, je n'éprouve aucun enthousiasme, mais bien au contraire, du rejet à voler sur ce type d'appareil. Néanmoins, je rejoindrai mon poste conformément à la note du commandant, en faisant remarquer que je lui laisse l'entière responsabilité de cette désignation, contraire à la sécurité des vols
Une cérémonie qui prenait un tout autre relief lorsque Myriam, donnait lecture d'une lettre que son père avait adressé en 1990 au directeur de la Sécurité Civile de l'époque, M. Hubert Fournier. Lettre restée sans réponse :
" Je viens d'apprendre mon détachement, jusqu'à l'automne 1990, au secteur SC2F [celui des Trackers]. Sachez que je ne suis pas volontaire pour travailler sur ce type d'appareil. Ma formation multimoteurs m'ayant toujours fait travailler en équipage depuis mes débuts dans la carrière aéronautique, fait que je ne conçois pas de travailler seul sur un avion qui, par construction, est prévu pour deux personnes. Piloter est une chose aisée, même seul. Réussir sa mission en toute sécurité en est une autre.
Je trouve donc que les mesures minimales de sécurité sur cet avion ne sont pas acquises. De plus, la commission d'enquête, suite à l'accident du 18 juin 1989 [dans lequel un pilote de Tracker, M. Lallement, avait trouvé la mort dans la région niçoise] a fait apparaître que " le comportement de l'avion est différent du manuel de vol ". Vous comprendrez donc, poursuivait Philippe Gallet dans sa lettre au directeur de la sécurité civile, que, psychologiquement, je n'éprouve aucun enthousiasme, mais bien au contraire, du rejet à voler sur ce type d'appareil. Néanmoins, je rejoindrai mon poste conformément à la note du commandant, en faisant remarquer que je lui laisse l'entière responsabilité de cette désignation, contraire à la sécurité des vols ".
Au bord des larmes, Myriam et Isabelle se tenaient la main et l'émotion gagnait l'assistance.
Deux gerbes étaient ensuite déposées par les autorités, avant qu'une minute de silence ne soit observée.
Ultime geste de Myriam et Isabelle qui venaient se recueillir devant la stèle de leur papa où on pouvait lire en français et en corse : « N'oublions jamais le sacrifice de Philippe Gallet, pilote de la Sécurité Civile, décédé en ce lieu le 24 septembre 1990 aux commandes du « Tracker 3 » en luttant contre un incendie de forêt » - « Mai ù ci sminticaremu di u sacrifiziu di Philippe Gallet, pilota di a Sécurità Civile smaritu in stu locu, u 24 Sitembre di u 1990 à e cummande di u Tracker 3, luttendu contr'à un incendiu di furesta », elles déposaient un petit galet blanc en forme de cœur ramené de Bretagne.
C'est dans le petit établissement du « Prince Pierre » qu'un rafraîchissement était offert.
Gilbert Guizol