Surpopulation carcérale en Corse : Darmanin promet des places, les syndicats réclament des actes
Le constat est alarmant dans les centres pénitentiaires corses. À Borgo comme à Ajaccio, les syndicats dénoncent des conditions de détention dégradées et une pression croissante sur les équipes. « Sur le centre pénitentiaire de Borgo, trois détenus dorment à même le sol », témoigne Raphaël Barallini, délégué régional FO Pénitentiaire. « Le personnel cumule jusqu’à 90 heures supplémentaires par mois. C’est intenable. » La situation est identique à la maison d’arrêt d’Ajaccio. Construit en 1848, l’établissement, prévu pour 50 détenus, a récemment hébergé jusqu’à 94 personnes. Dix-sept d’entre elles dormaient directement au sol, faute de place. Pour les syndicats, il devient impossible de garantir la sécurité et la dignité dans ces conditions.
Des annonces, mais peu d’effets immédiats
Lors de son déplacement à Bastia ce jeudi 5 juin, Gérald Darmanin a réaffirmé sa volonté de construire « des places supplémentaires de prison » en Corse. Il s’est dit favorable à la création d’une nouvelle unité carcérale sur l’île, ainsi qu’à l’ajout de places en semi-liberté à Borgo et Casabianda. Le ministre a également abordé la question de l’éloignement des détenus, pointant le fait que de nombreux Ajacciens sont aujourd’hui incarcérés à Bastia. Il souhaite que les prisonniers soient détenus au plus proche de leur famille, saluant par ailleurs la participation de la Collectivité au réaménagement du terrain de sport de la prison de Borgo. Mais ces annonces, jugées insuffisantes par les syndicats, peinent à convaincre. « Il faut 18 mois à deux ans pour rendre opérationnels des bâtiments modulaires, et sept ans pour construire une prison classique », souligne Raphaël Barallini. « On ne peut pas attendre autant, alors que toutes les structures sont déjà en surpopulation. »
Une urgence qui s'aggrave avec l'été
La haute saison touristique pourrait encore aggraver la situation. En période estivale, la population de l’île double, voire triple, ce qui entraîne mécaniquement une hausse du nombre d’incarcérations. Par ailleurs, les effectifs manquent cruellement : à Borgo, 90 agents seraient nécessaires, mais seulement 66 sont en poste. Et certains d’entre eux doivent déjà être redéployés pour des missions supplémentaires, notamment de sécurité ou de surveillance vidéo, sans renforts prévus.
Des attentes fortes de la part des syndicats
Si les syndicats reconnaissent que les annonces ministérielles pourraient produire des effets à long terme, ils réclament des mesures immédiates. « Ce qu’on attend, ce sont des solutions pour l’instant T. Les détentions sont en train d’exploser », alerte le représentant de FO. « Il faut des renforts, de l’espace, des réponses concrètes. »
Sharon Rouanet