Lundi 23 janvier 2023

Assassinat de Julie Douib : Reprise ce matin du procès en appel

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famille douib
Après le week-end, le procès en appel de Bruno Garcia-Cruciani, condamné en juin 2021 à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d'une période de sûreté de 22 ans et du retrait de l'autorité parentale sur ses deux fils, a repris ce lundi matin devant la Cour d'assises de Corse-du-Sud à Ajaccio. La thèse de la préméditation était au cœur des débats.

L'audience de cette deuxième journée du procès en appel s'ouvrait à 9 heures.

Répondant aux propos de Bruno Garcia-Cruciani invité à s'exprimer sur sa version des faits de ce drame qui le 3 mars 2019 a coûté la vie à Julie Douib, 34 ans, mère de deux enfants, la présidente retorquait : « si j’ai bien compris vous vous souvenez d’un coup de feu dans la chambre et d’un autre sur la terrasse, deux coups de feu ! » 

Le premier des gendarmes enquêteurs donne, photos à l'appui, un état des lieux où s'est noué le drame avant d'affirmer que la version des faits de l'accusé n'est pas corroborée par ses déclarations, ni par les expertises techniques ou encore par les relevés de vidéosurveillance.« Vous avez réussi à faire un parcours chronométré des faits du 3 mars 2019 ? », interroge la Présidente. « Oui, on sait que Bruno Garcia arrive à 11h05 chez Julie Douib et qu'il repart à 11h12 » répond l'enquêteur, ce qui fait dire à Me Jean-Sébastien de Casalta, avocat de la famille Douib : « il s'est donc passé moins d'une minute entre l'entrée de Bruno Garcia dans l'appartement et le premier coup de feu, c'est ça ? ».

Me Gilles Antomarchi, avocat de Bruno Garcia-Cruciani passe à son tour à l'offensive.

Un autre enquêteur vient à la barre et s’exprime sur le déroulement de la garde à vue de l'accusé. Des faits relatés, il ressort que Bruno Garcia-Cruciani s'est rendu au domicile de Julie « pour discuter du planning concernant la garde des enfants mais aussi pour lui faire peur, lui reprocher ce qu'elle fait subir aux enfants, ses plusieurs plaintes à son encontre ou encore sa relation avec un prof de sport. » Puis, il poursuit en expliquant que Julie était assise au sol, qu'elle a attrapé le canon de l'arme qu'il tenait, doigt sur la gâchette, et qu'il a alors paniqué et que le coup est parti.

Me Antomarchi et Me Eon, avocats de Bruno Garcia-Cruciani, vont questionner les enquêteurs au point de mettre à mal la thèse de la préméditation.

Enfin, avant la pause, c'est la directrice d'enquête qui se présente à la Barre. Sans rentrer dans le détail sur les interrogatoires, elle revient sur l'enquête effectuée auprès du club de tir où l'accusé affirmait devoir se rendre le 3 Mars  2019, jour du drame. Il ressort de celle-ci qu'il n'était pas connu de bon nombre d'adhérents, qu'il n'était pas à jour de sa licence, n'avait pas mis les pieds au stand de tir depuis au moins 5 mois et qu'il n'était pas à jour de sa licence, tout comme il n'avait pas fourni de certificat médical valide. De ce fait il était interdit de stand de tir.

Il m'a tuée

La directrice d'enquête avance ensuite des éléments tendant à pencher sur la thèse de la préméditation. Documents administratifs des enfants confiés quelques jours plus tôt à sa tante de cœur, des preuves de violences et insultes enregistrées sur son portable par Julie et diffusée en première instance. Certains de ces enregistrements attestent de la présence des enfants. « Maman est-ce que tu vas partir? Demande un des fils de Julie. « Non mon Chéri je ne t’abandonnerai pas » répond la mère de famille. Une fois encore s'en est trop pour Lucien et Violetta ses parents et pour Jordan son frère. Suspendue, l'audience reprenait à 14 heures.

En visio conférence, l'expert psychiatre qui a rencontré Bruno Garcia-Cruciani en prison explique que l'accusé ne souffre pas de troubles anxieux et qu'il supporte mal qu'on lui pose des questions pour jauger de son niveau. Il explique que sa relation avec Julie s’est dégradée quand elle a eu une relation avec son prof de sport, Sébastien G. et affirme que sa femme ne s’occupait plus de ses enfants comme elle se devait. L’expert mettait l’accent sur l’état paranoïaque de l’accusé et la haine en lui envers le père et l’amant de Julie. Il faisait état de son inquiétude par rapport au danger que pourrait représenter l’accusé pour son beau-père. Bruno Garcia-Cruciani estime pour sa part que sa place n’est pas en prison.

Me de Casalta regrettait que l’accusé ne se soit pas livré à une remise en cause de sa structure psychique.

Autre point important soulevé par la défense, la prise de stéroïdes par l’accusé. « Est-ce qu'ils peuvent induire un passage à l'acte ? ». L’expert répondait que ces médicaments pouvaient renforcer les traits de personnalité mais pas déclencher un passage à l'acte. Me Antomarchi faisait référence aux stéroïdes qu’a pu prendre Bruno Garcia-Cruciani pour refaire surface en énumérant les effets secondaires de ces anabolisants (paranoïa, énervement).

Maryse, amie et voisine de Julie Douib, est revenue avec beaucoup d’émotion sur cette journée du 3 mars 2019 : « en montant chez elle après avoir entendu du bruit, j’ai croisé dans les escaliers Bruno Garcia-Cruciani, la porte de l’appartement était grande ouverte et j’ai vu du sang. Je l’ai trouvé agonisante sur la terrasse et elle m’a dit dans un dernier souffle « il m’a tuée. »

La directrice d’Enquête revenait à la barre pour confirmer une nouvelle fois la thèse de la préméditation, évoquant notamment la vente des deux voitures, la procuration faite à sa tante de cœur sur son compte en banque concernant son loyer et surtout la discussion qu’il a eu avec le frère d’un détenu à qui il a dit : « moi aussi je vais bientôt rejoindre ton frère à Borgo. »

On retiendra de cette journée le souci de la défense à écarter la thèse de la préméditation avancée par les enquêteurs venus à la barre. Cette journée très éprouvante pour la famille de Julie Douib et ses proches s’achevait ainsi.

Reprise des débats demain matin.

GILBERT GUIZOL