Samedi 22 mai 2021

Calvi : conférence régionale des bâtonniers du Sud-Est

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bâtonniers Sud-Est
Une fois par mois, les bâtonniers du grand Sud-Est ont pour coutume de se réunir pour travailler, mais faute à la pandémie, les réunions précédentes avaient été reportées. Jean-Paul Eon, bâtonnier du barreau de Bastia a décidé d’inviter ses confrères à Calvi. Un week-end studieux qui donnera l’occasion de faire découvrir la cité balanine à la douzaine de bâtonniers présents.

La conférence régionale des bâtonniers se réunit de manière régulière et chaque fois dans le ressort d’un barreau different. Un barreau invite les autres membres de la conférence afin de pouvoir travailler sur des points spécifiques relatifs à l’actualité ou à des points juridiques particuliers. C’est Calvi qui sera à l’honneur à l’occasion de cette réunion organisée par jean-Paul Eon bâtonnier du barreau de Bastia. Ce sont une trentaine de cours d’appel qui seront représentées par les participants.

« J’ai choisi de le faire à Calvi, car c’est un lieu agréable qui ne manque pas d’endroits pour se réunir, c’était l’occasion d’inviter mes confrères et faire découvrir la ville à ceux qui ne la connaissaient pas. Calvi est l’écrin, mais ça ne change rien au contenu du travail même si j’ai pensé que ce serait un plus indéniable.»

Le principe essentiel d’une conférence régionale est que chaque bâtonnier porte la voix de son barreau et lorsqu’il souhaite se prononcer sur un sujet, il y a un véritable échange qui s’opère et une véritable équité que l’on soit le représentant d’un barreau important ou plus modeste.

Les motions débattues et adoptées par la conférence régionale, qui représente des milliers d’avocats, sont ensuite portées à la conférence nationale ce qui permet d’avoir un certain poids.

« C’est un lieu on l’on peut rétablir l’équilibre entre les petits et moyens barreaux et les plus grands. À l’inverse de la position du barreau de Paris, le plus grand, dont la philosophie consiste à dicter et vouloir commander les autres, raison pour laquelle il a quitté la conférence des bâtonniers » précise Jean-Paul Eon.

Séance de travail studieuse

Ce samedi, dans la salle de conférence du relais-châteaux La Signoria, de nombreux points juridiques ont été débattu afin de définir une position commune. L’ordre du jour est définit suite à un échange préalable entre les bâtonniers sur les nouveaux textes, les réformes à mettre en place, les méthodes appliquées en fonction des moyens de chacun, l’actualité peut aussi bouleverser le programme de la réunion.

« L’intérêt d’une conférence régionale réside dans le fait que lorsque l’on fixe une question à l’ordre du jour, chaque bâtonnier à la parole. C’est riche, très intéressant de voir la diversité des interprétations selon les différents territoires. Chacun s’organise en fonction de ses moyens, de la réalité du terrain. Cela nous permet de comparer nos vécus, nos organisations qui ne sont pas toujours transposables mais malgré cela, il y a toujours des leçons à en tirer » explique Jean-Paul Eon.

La Présidente de la conférence régionale du grand Sud-Est, Pascale Girma, ajoute : « On suit l’actualité, il y a des conventions qui sont faites par barreau et ces réunions nous permettent de voir comment l’on peut mettre en place certains mécanismes et fonctionnements de façon plus collégiale quand cela est possible. Ensuite, je porte ces réflexions au niveau national, tout ce travail à un réel impact. »

L’État a du mal avec les avocats

La réforme de la justice portée par Me Dupont-Moretti soulève des inquiétudes, de nombreux amendements viennent perturber la cohérence du projet et des débats, ce qui ne facilite pas la tâche du ministre.

Pour Pascale Girma « L’État a du mal avec les avocats car nous sommes indépendants et on y tient. Actuellement, il cherche à nous canaliser au niveau de la discipline. Ils veulent que l’on s’auto contrôle financièrement. Nous faisons remonter des motions, des propositions de terrain au niveau national. Pour ma part en tant que Présidente d’une conférence régionale, je me réunis une fois par mois avec les autres présidents régionaux en visioconférence afin de faire partager le fruit de nos réflexions, de notre travail collectif. »

De son côté, Jean-Paul Eon estime que cette réforme est « un projet qui a été bâclé, quelque chose de politique pour redonner confiance en la justice. Il nous appartient de nous positionner et éventuellement, si nous pensons que cette réforme n’est pas bonne pour la justice et le justiciable, on doit essayer de freiner le mouvement. Nous sommes une force de proposition, nous avons pour devoir de dégager une idée commune et de la défendre avec énergie. »

Constat amer : la justice manque de moyens

Depuis de nombreuses années, les magistrats demandent plus de moyens de la part de l’État, un appel qui ne semble pas être entendu. Bien que le budget de la justice ait augmenté, c’est surtout l’administration pénitentiaire qui en profite. L’état des prisons et la surpopulation carcérale absorbe une grosse partie des crédits accordés.

« Le problème est exclusivement un problème de moyens. On oblige aujourd’hui les avocats à devenir des acteurs de la justice et on favorise les accords pour désengorger les tribunaux. L’État se désengage par faute de moyens, il n’y a pas assez de greffiers et de magistrats. La justice devient un marché économique, ils veulent créer des plateformes pour la médiation, qui soient numérisées, déjà de grands groupes se positionnent là dessus et c’est assez inquiétant » regrette Pascale Girma.

Pour Jean Paul Eon « Le problème est que la justice est au bord de l’implosion. Cela fait des décennies qu’on le dit. On ne veut pas mettre la main à la poche et donner les moyens à la justice. La justice a des moyens indigents et sans moyens, on utilise des artifices pour accélérer les décisions. On raconte aux gens que le plus important c’est que l’on soit rapide et on met en place une réforme qui permet d’annuler un grand nombre de procédures. On vide les tiroirs de manière artificielle. »

«  Il est clair que nous sommes en queue de peloton au niveau européen en ce qui concerne le nombre de greffiers et de magistrats. En ce moment les représentants de nos institutions représentatives multiplient les rencontres avec les députés et les groupes parlementaires pour avoir une influence, faire part de nos propositions, inquiétudes et des remontées de terrain. » conclut Julia Tiberi

L’université d’été des barreaux se tiendra également à Calvi du 25 au 28 août prochain. Une centaine de bâtonniers sont attendus. Les travaux se tiendront les 26, 27 et 28 août. Le bureau viendra dès le 24 août avec deux ou trois salariés pour préparer le terrain.

Un événement de grande envergure avec encore une fois, Jean Paul Eon dans le rôle de l’organisateur.

Texte et photos François Colombani