Mercredi 24 février 2021

La Confrérie Saint-Antoine Abbé de Calvi et l’oratoire au cœur de la vie calvaise, rencontre avec Nicolas Bras

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Nicolas Bras
La Confrérie Saint-Antoine Abbé de Calvi et l’une des plus ancienne de Corse ( XIVème siècle). Sa « Casazza », l’oratoire Saint-Antoine, se situe en plein cœur de la citadelle. L’édifice abrite depuis le début du XVIème siècle toutes les réunions et cérémonies de la Confrérie (messes, office des morts, office des ténèbres, semaine sainte, fêtes patronales...). Nicolas Bras, prieur de la Confrérie et employé municipal rattaché au service du patrimoine nous explique son parcours, le rôle majeur de la Confrérie dans la vie de la cité et son implication dans la conservation des lieux et objets religieux de la commune.

Très tôt, ce jeune calvais de 28 ans est attiré par la religion. La rencontre à l’adolescence avec Pierre Bertoni, acteur incontournable dans ce domaine, conforte sa foi et c’est tout naturellement qu’il s’oriente vers la Confrérie.

« J’ai toujours été sensible aux bâtiments religieux. Petit, j’allais à l’église avec ma grand-mère et je m’y suis toujours senti en paix. Pierre étant mon professeur de Corse au collège et voyant mon attrait, m’a proposé de venir à l’oratoire pendant les fêtes pascales. L’ambiance fraternelle, la bienveillance et le côté séculaire de l’institution ont accéléré mon cheminement et à 16 ans, j’étais intronisé confrère ».

La sortie du Christ noir lors du premier confinement reste l’un des moments forts de ma vie de confrère

Pour Nicolas, son investissement a pris de l’importance au fil des années. Rapidement, l’envie de perpétuer la tradition, transmettre et prendre des responsabilités se font ressentir. Il est aujourd’hui prieur de la Confrérie qui compte une trentaine de personnes. Les fonctions sont variées, allant de l’accompagnement des familles des défunts, à l’entraide envers les plus nécessiteux. Nombreuses sont les actions et aides auxquelles prennent part les confrères.

« Il faut réaliser que tu es dans une institution vieille de 700 ans et donc tu as une responsabilité et des devoirs. Durant cette crise sanitaire, beaucoup de personnes sont venues nous solliciter afin de les aider, ils savent qu’ici la discrétion est le maître mot . La sortie du Christ noir lors du premier confinement reste l’un des moments forts de ma vie de confrère. Suivre le chemin de procession qu’avait emprunté en 1455 nos ancêtres lors du siège turc fut un moment lourd de sens et sans doute historique. Mon intronisation et puis aussi le départ des « anciens », Martin Colombani et Jean-Paul Orsini restent pour moi des moments marquants car à mes yeux on est une famille ».

Si le livret regroupant l’ensemble des chants liturgiques est enfin disponible, ce fut un projet nécessitant beaucoup de temps et d’énergie qui s’est chevauché sur plusieurs « mandatures ».

Pierre Bertoni, Stéphane Serra et quelques autres ont travaillé sans relâche pour offrir un outil de qualité et essentiel dans la vie d’un confrère.

L’enregistrement des chants liturgiques est un projet en genèse. La volonté d’offrir et de rendre accessible aux calvais ce patrimoine immatériel de notre cité, est partagée par l’autre Confrérie calvaise, a Cunfraternita Sant'Eramu.

 

La préservation du patrimoine mobilier et immobilier à Calvi

 

« Je suis un privilégié, travailler dans le domaine de la conservation du patrimoine mobilier et immobilier, notamment le patrimoine culturel est une opportunité fantastique pour moi.

Dans le cadre de mon travail, j’ai passé d’ailleurs un stage de conservation préventive des objets classés au centre de conservation du patrimoine à Calvi. L’enregistrement, la conservation, la préservation et la restauration des objets demandent beaucoup de travail mais nous avons créé un réseau relationnel privilégié avec des acteurs disponibles et compétents au sein de la Collectivité de Corse et des services de l’État notamment la DRAC, pour mener notre action ».

À Calvi nous possédons près de 400 objets liturgiques, dont le quart est classé

Effectivement, Calvi a hérité d’un nombre conséquent d’objets et d’édifices religieux d’une importance historique rare tout au long de son histoire.

François-Xavier Acquaviva, adjoint au Maire de Calvi en charge du patrimoine, explique que tout cela est un travail long, fastidieux, coûteux et invisible aux yeux des gens.

« Prendre soin de son patrimoine, de bâtiments classés, d’objets classés, les répertorier et rechercher l’historique de certaines pièces, ça prend du temps. À Calvi nous possédons près de 400 objets liturgiques, dont le quart est classé. Ces objets sont soumis à des contrôles très stricts de la part des services de l’État, concernant les travaux entrepris, les restaurations envisagées. Les gens ne se rendent pas forcément comptes du cahier des charges à respecter. Nous avons lancé une étude de tous nos objets pour que chaque arrêté de classement soit vérifié, validé et enregistré. Il a fallu se plonger dans les archives communales et notre souhait à l’avenir est de numériser toute cette richesse culturelle afin qu’elle soit accessible au plus grand nombre ».

Une politique de sauvegarde est en train de se mettre en place avec notamment les services de l’État (DRAC).

Concernant l’oratoire, les fenêtres datant des années 70 sont en mauvais état et au cœur d’une réflexion très avancée.

L’humidité et les infiltrations sont les pires ennemis de ce bâtiment classé soumis à des conditions parfois extrêmes (vent, intempéries, embruns...).

C’est pour cela qu’un dossier technique a été constitué et soumis à validation aux différents services concernés.

Des études doivent être lancée afin de faire des expertises complètes de l’oratoire et de la cathédrale Saint Jean-Baptiste.

Si ces projets sont menés à terme nul doute que les confrères de Saint-Antoine pourront pour quelques siècles encore profiter de leur « Casazza » emblématique.

Texte François Colombani