Samedi 30 mai 2020

USA : Le réveil violent des tensions raciales

A l'heure de la digitalisation et dans un monde où tout le monde peut filmer ce qu'il veut grâce à son smartphone, le monde entier à les yeux rivés sur les USA où de nombreux drames racistes se sont déroulés en très peu de temps (mais depuis longtemps ...).

Georges Floyd, Minneapolis, Minnesota, 25 mai.

Cet ancien rappeur, père de famille, employé de sécurité et camionneur, a été, littéralement, assassiné en direct par un policier. Ce dernier lui a écrasé la gorge avec sa chaussure pendant 7 mn, malgré les cris de la victime, menottée, au sol. Le policier et 3 de ses collègues ont été virés de la police, et le premier inculpé d’homicide.

Breonna Taylor, Louisville, Kentucky, 13 mars.

Cette jeune femme de 26 ans, Ambulancière urgentiste, a été criblée de balles dans son lit par des agents des stups. Ils recherchaient un prévenu qui était déjà en garde à vue. Le FBI a ouvert une enquête le 22 mai.

Ahmaud Arbery, Glynn County, Georgia, 25 février.

Ce jeune électricien de 25 ans avait l’habitude de faire son jogging dans son voisinage. Il a été poursuivi puis abattu par un père, ancien enquêteur, et son fils, armés, qui le prenaient pour un voleur. La vidéo du meurtre n’a été diffusée que le 21 mai dernier.

Ces 3 noms sont ceux de 3 afro-américains, 3 « blacks », tués par des blancs. Floyd par un policier, Taylor par des agents des stups, Arbery par des suprématistes racistes, qui voulaient exercer leur justice, expéditive, comme la Georgie en avait l’habitude au siècle dernier.

A ces 3 drames ayant entrainé mort d’homme, on va ajouter 2 autres cas symptomatiques du malaise racial américain.

Christian Cooper, ornithologue, se promenait dans Central Park à New York, le 24 mai. Il demande à une jeune femme, blanche, Amy Cooper (homonyme) de mettre son chien en laisse, comme la règle l’impose. Cette dernière appelle alors la police pour indiquer qu’un homme afro-américain menace sa vie et avoir besoin d’aide. Le tout filmé par le premier.

À Minneapolis, des manifestations violentes se produisent depuis le meurtre de Georges Floyd. Un journaliste black de CNN, Omar Jimenez, a été arrêté pendant qu’il travaillait, parfaitement identifié. Il a été relâché 1 heure après. Son collègue, blanc, interrogé, n’a pas été arrêté.

Quant au Président Trump, il n’hésite pas à twitter « les pilleurs appellent les tireurs ». Le réseau social signale même son tweet, comme appelant à la violence. Trump enrage et menace d’attaquer en justice les réseaux sociaux (qu’il utilise abondamment pourtant).

Depuis le meurtre de Floyd et les révélations, qui viennent d’être publiées, sur les morts de Taylor et Arbery, la tension monte entre la population noire et les forces de l’ordre. Un commissariat a été incendié à Minneapolis, des voitures de polices brulées à Atlanta. Dans des dizaines de villes, des manifestations se déroulent, parfois violentes : Washington, New york, Detroit, Boston, Chicago, Dallas, Denver, Las Vegas, Los Angeles et New Orleans...

Ces actes racistes, leur quasi impunité, entraîne une montée des tensions raciales et sociales extrêmement dangereuse. On se rappelle du 29 avril 1992. Quatre policiers blancs accusés d'avoir tabassé un jeune Afro-américain, Rodney King, sont acquittés. À l'annonce du verdict, les quartiers pauvres de Los Angeles s'embrasent : des émeutes qui provoqueront la mort de plus de 50 personnes. Il y a eu d’autres séries d’émeutes, depuis 30 ans, toutes ayant pour point de départ la mort d’un afro-américain sous les balles de la police, ou des suites de son arrestation. L’impunité de certains des policiers, responsables, accroit la colère de la population.

Les problèmes que doivent affronter les américains en ce moment sont gigantesques. Ils sont confrontés à une épidémie meurtrière ayant causé plus de 100 000 morts, qui continue. La protection sociale, très faible pour les populations socialement défavorisées, majoritairement issues des minorités, les empêche de se soigner. Le chômage explose de plusieurs millions de personnes supplémentaires chaque mois. La cocotte-minute sociale bout. L’inconstance du président américain, ses jugements à l’emporte-pièce, sans recul, ses déclarations de matamore, font craindre le pire. Ces incidents et ces morts, racistes, seront-ils la goutte d’eau qui fera déborder la violence jusqu’à la rendre incontrôlable ? Quelle sera la réaction de l’administration Trump ? L’armée va-t-elle être envoyée pour mater les émeutes ?

Les prochains jours le diront. L’espoir est ténu.