Gestion de l’eau en Corse : à Ghisonaccia, la modernisation des réseaux suscite débat et inquiétudes

La réunion publique sur la politique de l’eau, organisée vendredi 16 mai à Ghisonaccia par l’OEHC et la Collectivité de Corse, a été marquée par de fortes tensions. Dès l’ouverture, une cinquantaine d’agriculteurs de la plaine orientale ont manifesté leur mécontentement face à la hausse annoncée du prix de l’eau et à la gestion de la ressource. Ils ont dénoncé un manque de concertation et alerté sur les conséquences économiques pour leurs exploitations. Laurent Venturini, agriculteur à Prunelli-di-Fiumorbu, explique : « L’OEHC a augmenté le prix de l’eau de 15 % depuis 2020. Nous demandons des rendez-vous depuis plusieurs mois sans obtenir de réponse, alors aujourd’hui nous avons décidé d’agir. Il en va de la survie de nos filières. »
Ce qui s’annonçait comme une simple réunion de présentation du projet a ainsi rapidement tourné à l’affrontement. Des chaises ont été violemment projetées à travers la salle, des sacs de maïs éventrés et déversés, et des bottes de foin déposées sur les tables. Un opposant au projet a également interpellé les exécutifs présents : « S’il y a la réunion, brusgiemu tuttu ! »
Face à eux, Gilles Simeoni, président du Conseil exécutif de Corse, a tenté de défendre le plan Acqua Nostra 2050, qui prévoit d’importants investissements pour moderniser les infrastructures hydrauliques et sécuriser l’approvisionnement. Il a insisté sur la nécessité de s’adapter aux défis climatiques et de garantir l’accès à l’eau pour tous les usages. Mais ses explications n’ont pas suffi à calmer la colère des agriculteurs, qui ont estimé que les décisions étaient prises sans tenir compte de la réalité du terrain. Les échanges houleux ont révélé une profonde fracture entre les institutions et le monde agricole. Les producteurs ont réclamé des mesures d’urgence pour préserver l’agriculture locale, menacée selon eux par des choix politiques jugés déconnectés.
Après plus d’une heure de discussion entre agriculteurs, représentants de l’OEHC et membres de l’exécutif, une rencontre a été convenue pour le 27 mai prochain avec les acteurs concernés. La réunion s’est terminée par l’annulation du reste du programme initialement prévu pour présenter le projet. Malgré la promesse de la mise en place d’un « cycle de travail autour d’une politique plus globalisée que l’eau afin de trouver un bon équilibre », faite par la présidente de l’Office, Vannina Chiarelli-Luzi, la frustration des agriculteurs s’est faite sentir.
Alicia Faure